Transfert du savoir : 3 pistes pour enrichir les compétences
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Dans un monde marqué par l’évolution fulgurante de la technologie et la montée de l’intelligence artificielle, le savoir-faire humain s’avère précieux. Nos entreprises québécoises détiennent cette richesse, désormais menacée par les nombreux départs à la retraite. Comment former une relève performante capable d’affronter les défis d’aujourd’hui et de demain, tout en préservant cette expertise accumulée au fil des décennies ?
La 10e édition du Grand Rendez-vous RH – manufacturier, qui s’est tenue le 19 novembre dernier à Drummondville, a mis en lumière cet enjeu crucial pour notre industrie ainsi que des solutions novatrices qui ont fait leurs preuves. On vous en dit plus dans cet article !
Offrir une formation en alternance travail-études
Rares sont les travailleurs et travailleuses de notre secteur qui souhaitent retourner à plein temps sur les bancs d’école pour se former ! C’est ce qui a motivé Tremcar, manufacturier de remorques-citernes et de camions-citernes, à développer sa propre école de soudage en collaboration avec le CSSS des Hautes-Rivières.
Le défi de recrutement chez Tremcar remonte bien avant la pandémie, si bien que le département RH avait épuisé pratiquement toutes les stratégies traditionnelles. La pression pour trouver une relève se faisait de plus en plus forte, au point de menacer la croissance de l’entreprise en raison de la pénurie de main-d’œuvre.
La grande idée : bâtir un programme rémunéré, menant à une formation certifiée et adaptée à la réalité de l’entreprise. L’alternance travail-études (ATE) a non seulement comblé les besoins criants en main-d’œuvre, mais aussi apporté une solution durable à plus long terme.
Maude Poudrier, directrice des ressources humaines, raconte que ce projet innovant a formé jusqu’ici 92 soudeurs et soudeuses, dont 40 qui sont toujours à l’emploi de l’entreprise. Une réussite qui place « l’école Tremcar » au cœur de la stratégie de recrutement de l’entreprise.
Parallèlement, le Groupe Geloso a monté une formation AEP en opération d’équipements en transformation alimentaire, en partenariat avec le CSMOTA. La combinaison de la théorie et de la pratique en milieu de travail a permis d’offrir une immersion complète dans la réalité de l’entreprise.
Sonia Cacheleux, directrice des ressources humaines, rappelle que l’alternance travail-études est bien implantée dans son pays d’origine, la France. Elle insiste sur l’importance d’adopter ce modèle ici, au Québec, afin d’intéresser la relève à des secteurs moins connus ou moins valorisés, comme c’est le cas pour l’industrie de la transformation alimentaire.
« Le CSMOTA s’est révélé une véritable boîte à outils, nous informant sur les subventions et les solutions à notre portée », explique-t-elle. C’est effectivement le rôle des comités sectoriels de soutenir les entreprises de leur secteur respectif en mettant à leur disposition les ressources et informations nécessaires pour favoriser le développement de la main-d’œuvre.
Autant pour Tremcar que pour Groupe Geloso, la collaboration avec des partenaires du monde du travail et de l’éducation a mené à la création de programmes qui assurent la transmission du savoir-faire et le développement d’une relève compétente en entreprise.
Numériser les savoirs
Chez Beaulieu Canada, expert en fabrication de couvre-planchers, le transfert du savoir passe par la centralisation et la numérisation des connaissances clés. Une vague de départs à la retraite a poussé l’entreprise à sortir des sentiers battus pour veiller à une continuité opérationnelle durable.
C’est ici que François Lallier est entré en jeu, afin de capter les savoirs critiques des employés en poste depuis 35, voire 40 ans. La documentation était déficiente, parfois inexistante — un grand défi qui a captivé ce détenteur d’un diplôme de deuxième cycle en andragogie (la science et la pratique de l’éducation des adultes, distincte de la pédagogie axée sur les enfants).
À travers un parcours de formation numérique alliant micro-vidéos et documentation, la relève plonge rapidement dans l’univers de Beaulieu Canada. Les instructions de travail très visuelles facilitent grandement l’apprentissage et le transfert du savoir.
Évidemment, des indicateurs de performance (KPI) sont en place pour assurer un suivi optimal et une saine gouvernance. Cela dit, l’entreprise manufacturière fait surtout confiance à l’autonomie de son personnel pour se former efficacement dans les locaux aménagés à cet effet.
Les résultats sont au rendez-vous, avec un gain de production de 8 % en soufflage — tout un exploit ! Au point que la société-mère, en Belgique, pourrait bien emboîter le pas de sa filiale canadienne dans un avenir rapproché…
Implanter un programme d’annonce à la retraite
Les départs soudains à la retraite — parfois avec à peine une ou deux semaines d’avis — étaient monnaie courante chez Delpharm Montréal. À cela s’ajoutait un taux de roulement de 50 % parmi les nouvelles embauches au cours des 6 premiers mois. Le laboratoire pharmaceutique devait alors constamment redoubler d’efforts pour honorer les commandes de sa clientèle.
Pour réduire la perte du savoir critique et le roulement du personnel, le département RH a pris l’initiative de lancer un programme d’annonce à la retraite, incluant une compensation de 1 500 $ aux personnes qui donnent un préavis de 6 mois avant de quitter. Cette récompense a vite trouvé écho auprès de la main-d’œuvre expérimentée.
D’autres aménagements ont également été mis en place, comme la possibilité pour les employés expérimentés de devenir formateurs seniors auprès de la relève ou de participer à des projets spéciaux, afin d’alléger la charge physique de certains postes. Ainsi, le préavis de six mois avant la retraite peut servir pour favoriser l’intégration harmonieuse de la relève et renforcer son sentiment d’appartenance à l’entreprise.
Karine Perron, directrice des ressources humaines pour Delpharm Canada, a même souligné que certains « futurs retraités » ont prolongé leur préavis de six mois, afin de poursuivre leur rôle dans la formation au sein de l’entreprise ! Une réussite qui montre que des employés motivés et dévoués peuvent transformer la fatigue physique et la lassitude en engagement durable envers l’entreprise et sa relève.
Avec des cas concrets de formation en alternance travail-études, de numérisation du savoir et de programme d’annonce à la retraite, on peut dire que les entreprises manufacturières d’ici se sont donné les moyens d’assurer le transfert du savoir. Souvent, la solution se trouve aux antipodes des tactiques RH traditionnelles utilisées abondamment. Ainsi, les solutions les plus simples en dehors du cadre normal apparaissent souvent les plus efficaces.
Plus que jamais, il faut faire preuve de créativité — clin d’œil à l’incroyable conférencier Roch Fortin, que vous avez peut-être eu la chance d’écouter en personne au Grand rendez-vous RH manufacturier, sinon, vous avez manqué quelque chose !
Et si vous avez besoin d’un coup de pouce ou de bonnes idées pour brainstormer, n’hésitez pas à communiquer avec Formabois, votre comité sectoriel de main-d’œuvre de la transformation du bois. Une équipe qualifiée qui pourra discuter des différentes options spécifiques pour vous : programmes COUD, projet Trajectoire, formation continue et plus encore. Nous avons une boîte à outils bien garnie pour épauler votre département RH comme il se doit !
Par Maude Lambert-Bonin, rédactrice web pigiste pour Formabois depuis 2018. À travers ses articles de blogue, Maude met en lumière les acteurs et les initiatives qui façonnent l’avenir de l’industrie de la transformation du bois au Québec.
Le Grand Rendez-vous RH manufacturier sera de retour en 2026 avec de nouvelles conférences. Visitez le site web de l’événement pour plus de détails.